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La Chaire a lu pour vous : Notre air est-il respirable ? de L.Loumé et F.Marano

Publié le 26 mars 2019

 

En France, l’attention portée au phénomène de la pollution est grandissante. On en parle systématiquement dans les médias lors des pics de pollution. Les Français.es, s’approprient ce concept qui fait maintenant partie de leur quotidien en réduisant l’usage des voitures lorsque cela leur est conseillé, en achetant des produits spécifiques pour le soin de la peau -afin d’éviter les effets des particules fines-, en s’intéressant de plus en plus à la consommation des produits issus de l’agriculture biologique -qui assurent la non utilisation de certains produits chimiques- et en réclamant avec véhémence un environnement « plus propre » pour les générations à venir.

Néanmoins, les connaissances requises pour faire face à un phénomène aussi complexe que riche et passionnant, sont loin d’être celles dont la population dispose. C’est ainsi que Lise Loumé et Francelyne Marano (1) nous accompagnent à décortiquer, de façon très simple et didactique, chacun des enjeux liés au phénomène de la pollution et nous fournissent des pistes sur les pratiques à adopter afin de réduire les niveaux de pollution agrégées et les risques individuels sur la santé et la qualité de vie. Il est à noter que les auteures se basent principalement sur des découvertes scientifiques les plus récentes et mobilisent des exemples de pratiques et d’expériences venant des quatre coins de la planète.

L’ouvrage débute avec une analyse des données qui remet en question par exemple, la certitude de vivre dans une France de plus en plus polluée ou celle qui voudrait faire croire que toute forme de pollution est issue directement des activités humaines. Puis le premier chapitre adopte une perspective historique et nous rappelle l’un des premiers épisodes de pollution sur terre : celui de la « grande oxydation » qui a donné lieu au développement de la couche d’ozone stratosphérique et de la vie telle que nous la connaissons aujourd’hui.

Les auteures développent également une analyse centrée sur la contribution des différentes activités humaines à la pollution. Le livre illustre quelques exemples de polluants dont le taux présent dans l’air a décru les dernières décennies ainsi que les causes principales causes d’une telle transformation : il s’agit principalement de la modification dans la production ou la consommation de certains types des produits et de la mise en place des réglementations.

Pour sa part, le deuxième chapitre se centre sur le lien entre la multiplicité des polluants existants et les conditions de santé des individus. Il se focalise également sur la description des sept catégories de polluants, sur les secteurs économiques les plus concernés (industrie, transports, agriculture et logements) par chacun et sur les risques associés en fonction des caractéristiques des individus.

Les effets différenciés en fonction des conditions de vie sont également mentionnés et les inégalités sociales sont mises en avant pour expliquer l’inégalité face à l’exposition aux polluants. Les auteures fournissent une liste détaillée des exemples de solutions identifiées dans les différents continents associant les normes et instruments économiques (taxes, subventions) réduisant la pollution dans l’air. En France, la question se centre principalement sur les emplacements des logements et sur l’accès aux transports publics, qui peuvent eux aussi s’avérer une source non-négligeable d’émission des particules fines.

Loumé et Marano, catégorisent également deux types de pollution : extérieure et intérieure. Les auteurs affirment l’existence des effets croisés entre les polluants issus de chaque type et les conséquences nocives sur la santé des individus, animaux, végétaux et bâtiments. La pollution extérieure provenant des activités économiques reste une préoccupation sociétale et nécessite des mesures d’urgence. La pollution intérieure, liée à l’utilisation des produits de nettoyage, des bougies parfumées et aux fumées de la cigarette peut être évitée avec des gestes simples et des bonnes pratiques de ventilation.

Le dernier chapitre met quant à lui en avant des idées insolites pour réduire les taux de polluants dans l’air, des objectifs mondiaux sur le long-terme et des moyens déployés pour les atteindre. Les auteures répondent ainsi aux questions les plus courantes suscitées par le phénomène avec des résultats scientifiques et des preuves empiriques récentes.

L’ouvrage conclut en énumérant quelques fausses solutions à la pollution telles que l’utilisation des purificateurs d’air, des encens ou des plantes dépolluantes qui s’avèrent très efficaces uniquement dans des environnements expérimentaux contrôlés.

A travers des sujets très vastement traités, les auteures s’éloignent d’une posture alarmiste mais soulignent l’importance de la continuité des efforts pour réduire la pollution. Elles font également référence à d’autres phénomènes naturels générant des substances chimiques nuisibles à la vie et n’étant pas directement provoqués par l’Homme. Ce livre illustre, par ailleurs, la relation étroite de dépendance entre les modes de vie, le fonctionnement du système économique, le potentiel d’innovation des différentes sociétés et les types de polluants apparus à des moments précis de l’histoire. Il ouvre la porte à des questions intéressantes et fournit les mots nécessaires et des concepts clés qui permettent au lecteur intéressé de se diriger vers des documents plus spécialisés.

Nathaly Cruz, Doctorante « Rénovation énergétique, bâtiments, réseaux sociaux »

(1) Lise Loumé : Journaliste spécialisée en santé, chef d’édition web du magazine Sciences et Avenir. Francelyne Marano : professeur émérite de biologie cellulaire et de toxicologie à l’Université Paris-Diderot et membre du Haut Conseil de santé publique

Loumé L. et Marano F., 2018. Notre air est-il respirable ? Le vrai du faux sur la pollution intérieure et extérieure. Editions Quae, Collection : Science et quotidien, 166p.